30 sept. 2012

Les crimes économiques: Notre grand chantier


Les crimes économiques
(L'Express dimanche du 30 septembre 2012) 
Notre grand chantier

La lutte contre les crimes économiques est un des grands chantiers à mettre à exécution pour que toute la République de Maurice puisse progresser au bénéfice de l’ensemble de ses citoyens et non de quelques privilégiés. Les lois actuelles sont d’une particulière inefficacité si l’on considère le nombre d’affaires mises à jour par la presse de manière générale.

Une série de mesures urgentes sont à prendre. Il va de soi que les principaux partis politiques, affectés par les révélations de la presse d’une manière ou d’une autre ne seront pas enclins à mener de front le combat contre les crimes économiques.

Le RCP propose trois séries de mesures.

Dans un premier temps, il y a lieu de corriger et combler tous les vides juridiques (loopholes), malfaçons rédactionnelles et inconstitutionnalités pouvant découler de la Loi portant « Prevention of Corruption » de 2002. À titre indicatif, l’article 7(2) de la Loi fait état d’un principe de présomption de culpabilité en violation manifeste des dispositions de la Constitution qui pose le principe de la présomption d’innocence. En laissant une telle incongruité juridique, celui qui est mis en cause peut à tout moment invoquer l’inconstitutionnalité de la Loi et par là même son inapplication, ce qui fera tomber tout le dossier à charge !

Aussi, l’institution chargée de la lutte contre les crimes économiques doit pouvoir jouir d’une parfaite indépendance. Actuellement, le Directeur général de l’ICAC est nommé par le Premier ministre sur avis du Leader de l’Opposition. Or, l’ICAC est chargée de traquer les crimes économiques commis par les hommes publics dans l’exercice de leurs fonctions. En bonne logique, il ne peut leur appartenir de choisir leur enquêteur ! C’est pourquoi, nous proposons que le Directeur de l’ICAC soit nommé par le seul Chef-Juge.

Les critères de choix du Directeur général de l’ICAC sont trop larges et laissent par là même une trop grande discrétion au Premier ministre. En effet, la loi prévoit que le Chef du Gouvernement choisit le Directeur général parmi les juges en exercice ou anciens juges de la Cour suprême, les magistrats ayant plus de dix années d’expérience, les avocats ayant plus de dix années de barreau, ou des personnes ayant cumulé les deux fonctions pour une même période, ou encore une personne ayant une expérience étrangère au sein d’une institution équivalente à l’ICAC.

Le RCP estime que le Directeur général de l’ICAC doit être choisi parmi les seuls Juges en exercice ou anciens Juges de la Cour suprême et, seulement à titre subsidiaire, parmi les magistrats en exercice et non des avocats en exercice.

Par ailleurs, certains délits économiques ne sont tout simplement pas répertoriés par la Loi modifiée de 2002. On peut faire état du « délit d’initié » (illegal use of insider information). Le délit d’initié est constitué par l’utilisation des informations privilégiées à des fins économiques. Par exemple, un responsable politique ou public décide de prendre une mesure telle que l’utilisation du casque obligatoire spécial pour tous les cyclistes. Parallèlement, juste avant la mise à exécution de cette mesure, il, ou une personne interposée, fait ouvrir un magasin de casques pour cyclistes. Il prend tous les éventuels concurrents de vitesse grâce à l’information privilégiée qu’il a pu avoir. La Loi de 2002 est particulièrement muette sur le sujet.

Enfin, un autre délit nécessite d’être créé. Il s’agit du gaspillage à outrance des fonds publics ou à usage personnel grâce à un détournement de l’utilisation. Deux exemples peuvent nous venir à l’esprit. D’une part, les gaspillages manifestement inutiles pour la cause de l’État, tel qu’un voyage à l’étranger non nécessaire ou dans des conditions de grands luxes. D’autre part, l’on pense au détournement de l’utilisation des fonds dépensés.

Telles sont les principales mesures, non exclusives bien entendu, que le RCP propose de mettre en œuvre pour combattre les crimes économiques.

Parvèz DOOKHY
Président du RCP

24 sept. 2012

REFORMES ELECTORALES: Décommunautarisation politique et démocratie


REFORMES ELECTORALES: Décommunautarisation politique et démocratie

Le Ralliement Citoyen pour la Patrie (RCP) prône une décommunautarisation complète de la politique et un renforcement de la démocratie. Ce sont les deux principes qui doivent guider toute réforme électorale.
Or, c’est tout le contraire des propositions actuelles, que ce soit du gouvernement ou de l’opposition. Eux proposent un communautarisme déguisé, voire même accentué et une confiscation du jeu politique dès lors qu’il appartient au chef de parti de nommer des députés best-losers ou de placer ses proches ou lui-même en bonne position sur une liste électorale pour être élus à la proportionnelle.
Après avoir proposé un recensement communautariste déguisé (une série de questions pour déterminer l’appartenance ethnique des uns et des autres), le leader de l’opposition suggère que l’attribution des sièges best-loser soit confiée aux chefs de parti. Ce qui laisse à penser que le facteur communautariste va perdurer. Des candidats battus à une élection seront repêchés pour faire partie de l’Assemblée nationale en raison de leur appartenance ethnique ou communautaire. Au final, rien n’aura changé. Le communautarisme sera même accentué, car aux dires mêmes du leader de l’opposition les chefs de parti pourraient prendre en compte des sous-divisions des ethnies ou religions. Au passage, le leader de l’opposition voudrait s’attribuer les pouvoirs de la Commission de supervision des élections. Il souhaiterait nommer des députés à l’Assemblée nationale. Ce serait purement et simplement une grande régression de la démocratie.
La proportionnelle revient sur le tapis. On propose de rajouter aux élus du scrutin majoritaire (first past the post) et des best-losers, une vingtaine de députés élus à la proportionnelle, selon deux formules : soit il existe une liste séparée établie par chaque parti sur laquelle figure en ordre de priorité une vingtaine de candidats, soit les vingt autres députés sont repêchés parmi les meilleurs perdants des partis aux élections.
Selon le premier mode de sélection, qui semble être privilégié, le chef de parti aura un rôle primordial car ceux qui sont placés en tête de liste auront, s’il s’agit d’un parti bien implanté, toutes les chances d’être élus. Dans ce nouveau dispositif, l’électeur va voter, non pas pour des candidats, mais des partis.
Dans notre système actuel de scrutin majoritaire, l’électeur a pu toujours sanctionner des chefs de parti (SSR en 1982, PRB en 1987, SAJ en 1995, PJ en 2005 etc.). En votant pour des partis, l’électeur sera privé de cette possibilité, ce qui laisse à penser que les chefs de parti qui n’auront pas de circonscription sûre, se mettront en tête sur la liste (proportionnelle) pour être élus de manière aisée. Ce serait encore une belle perte du pouvoir démocratique et de sanction de l’électeur. Les familles dynastiques trouveront une meilleure implantation dans le jeu politique. Ceux qui sont sûrs de leurs circonscriptions placeront leurs plus fidèles ou proches en tête sur la liste.
Dans des pays où la proportionnelle est pratiquée, les partis politiques fonctionnent de manière démocratique. Les leaders changent et quittent la politique. Ce qui n’est pas le cas des partis habituels de Maurice. Tout le pouvoir interne est confisqué par le seul chef.
Si les députés à la proportionnelle sont désignés comme des meilleurs perdants selon le pourcentage de voix recueillis par les partis, ce serait tout autant un moyen facile pour permettre aux chefs de parti ou ceux ayant une bonne assise locale d’être « éternellement » élus. Avec un tel système, aucun des chefs de parti qui ont été battus tel qu’indiqué supra ne le sera « in fine », car il sera repêché par la proportionnelle. C’est aller à l’encontre des vœux de l’électorat !
Il est évident que les réformes proposées marquent tout à la fois une accentuation sournoise du réflexe communautariste et un recul de la démocratie. Le RCP s’oppose, en vertu de son attachement à la méritocratie, au mauricianisme et au principe même de la démocratie, à de telle confiscation du pouvoir par ceux qui ne veulent pas l’abandonner. Il ne peut y avoir de nomination de députés dans une démocratie. Les réformes proposées ne servent que les intérêts bien particuliers des uns non la Nation.
Le RCP veut anéantir tout réflexe communautaire pour faire primer la méritocratie. Il faut pour cela du courage et une belle idée de la Nation.

6 sept. 2012

LE BEST-LOSER: La dangereuse actualisation du communautarisme électoral


LE BEST-LOSER: La dangereuse actualisation du communautarisme électoral

Les récentes « observations » du Comité des Droits de l'Homme des Nations unies sont loin d'être non-équivoques. Alors que le Comité considère que la déclaration obligatoire d'appartenance communautaire est une violation du Pacte International relatif aux droits civils et politiques, il demande à l'État mauricien de faire procéder à un nouveau recensement communautaire dont le dernier datait de 1972 (the State party is under an obligation […] to update the 1972 census with regard to community affiliation and to reconsider whether the community based electoral system is still necessary).
Le recensement communautaire a été abandonné à juste titre depuis plusieurs décennies dans l'optique de faire promouvoir, du moins graduellement, le mauricianisme sur toute discrimination communautaire, même positive. Il s'agissait d'une première étape en vue de l'abolition du mécanisme de Best-Loser. Demander à l'État mauricien de procéder de nouveau à un recensement communautaire constitue un effet boomerang pour ne pas dire un retour en arrière. Le Best-Loser, loin d'être aboli, comme certains le prétendent à tort, ne sera que renforcé à l'issue de cet exercice.
L'approche du Comité des Droits de l'Homme est bien paradoxale, contestable et dangereuse.
La « communication » du Comité ne porte pas sur le bien-fondé du système des Best-Losers, sur lequel il demande simplement à l'État de reconsidérer s'il est vraiment utile. Le Comité a tranché uniquement la question relative au droit d'être candidat à la députation sans devoir faire preuve de son appartenance ethnique mais accorde au Best-Loser une nouvelle vie grâce à l'actualisation du recensement communautaire.
Une autre démarche eût été concevable. Car le droit d'être candidat sans devoir déclarer son appartenance ethnique existe bel et bien en l'état du droit. Malheureusement, les représentants de l'État mauricien ont failli considérablement dans leur argumentation auprès du Comité des Droits de l'Homme.
La Constitution mérite d'être relue et interprétée convenablement.
L'annexe 1 de la Constitution prévoit quatre groupes d'appartenance au choix pour tout éventuel candidat à la députation.
Il s'agit d'un groupe générique et de trois groupes religieux ou communautaires. Les groupes religieux ou communautaires sont : communauté hindoue, communauté musulmane et communauté sino-mauricienne. Le groupe générique est dit « Population générale ». Il ne s'agit pas d'un groupe résiduel qui se définit par rapport aux autres groupes communautaires contrairement à ce qu'ont indiqué les représentants de l'État mauricien. Dans ce dernier groupe, aucune référence n'est faite à une appartenance religieuse ou communautaire mais est défini comme un groupe de personnes partageant « un mode de vie » (way of life). Ce n'est pas un quatrième groupe « communautaire » mais est un groupe autonome et générique.
La Constitution laisse donc un choix aux éventuels candidats : soit de faire primer leur appartenance communautaire ou religieuse soit d'appartenir au groupe générique, donc a contrario sans faire état de leur appartenance religieuse ou communautaire. Le « mode de vie » s'interprète comme l'attachement à la population générale, autrement formulé « population mauricienne » avant toute chose, du moins dans la sphère de la vie publique.
C'est pourquoi le Ralliement Citoyen pour la Patrie (RCP) pose la problématique suivante et demande à ce que tous ceux qui se considèrent comme Mauriciens avant toute appartenance religieuse dans la vie publique ou politique :
1.     de se considérer comme « population générale » au sens constitutionnel du terme ;
2.     de décliner par avance, ou du moins de prendre l'engagement solennel, de renoncer au bénéfice de l'attribution d'un siège de Best Loser dans le cadre d'une consultation électorale.
Avec une telle approche, le peuple de Maurice saura qui des candidats préfèrent mettre de l'avant leur appartenance communautaire ou religieuse au détriment du mauricianisme ou inversement et le mécanisme d'attribution des sièges meilleurs perdants sera désuet.
Si l'ensemble des candidats favoris dans le cadre d'une élection adoptent une telle approche, le Best Loser se retrouvera caduc de facto.
La Commission de Supervision des Élections ne doit attribuer les sièges de Best Loser que dans la mesure du possible (« so far as is possible » comme le dit la Constitution). Des précédents ont démontré que la Commission n'a attribué en certaines occasions que 4 sièges des huit et lors des dernières élections seulement 7 des sièges.
Si cette approche est adoptée par tous les partis, il va de soi que la Commission ne pourra attribuer les sièges Best Loser.
Il est peut-être utile de souligner que les candidats dits « indépendants » sont exclus des bénéfices des sièges de Best Loser car la Constitution ne prévoit l'attribution de ces sièges que pour les candidats battus des partis. Ce qui signifie que déjà certains candidats sont exclus d'office des sièges Best Loser.
Enfin, dans l'approche du RCP, il n'y aura plus de communautés réduites à des sièges de Best Loser. Elles seront toutes des gagnantes et non des perdantes.
En anéantissant le système Best-Loser, son abolition pure et simple sera alors inévitable et une conséquence logique.