20 déc. 2011

Critiques du rapport de Guy Carcassonne

Critiques du rapport de Guy Carcassonne

Le Mauricien du 20 décembre 2011

Une grande francisation du régime y est proposée. Le système français est rationnel alors que le système anglais est beaucoup plus historique et fondé sur des conventions relatives aux mœurs du pays. Ces mœurs anglaises ne se retrouvent pas à Maurice. Guy Carcassonne a raison mais il n’a pas voulu aller jusqu’au bout de la logique de la rationalisation de notre régime parlementaire. Par exemple, les sessions parlementaires sont fixées au bon vouloir du Premier ministre. Il est le maître absolu des travaux parlementaires. En Angleterre, le Premier Ministre n'abusera pas de cette prérogative. A Maurice, c'est de l'abus pur et simple au mépris de la démocratie. Il faudrait, à mon avis, avoir des sessions parlementaires fixées constitutionnellement et éventuellement avoir des sessions extraordinaires en cas de besoin. Guy Carcassonne ne l’a pas suggéré.

Guy Carcassonne propose le système proportionnel. Or, nous avons actuellement un scrutin majoritaire à un tour qui permet de dégager un gouvernement fort. Il serait bien dangereux d’instaurer la proportionnelle à Maurice. Il y aurait trop de partis représentés à l’Assemblée Nationale. Déjà nous avons avec le scrutin majoritaire 7 partis y sont présents sur 69 députés ! Le scrutin proportionnel conduit à un dysfonctionnement du système politique ; il favorise le multipartisme. Il rend difficile l’émergence d’une majorité stable. Notre système institutionnel est de type Westminister, c’est-à-dire un régime parlementaire. S’il y a trop de partis, par définition avec notre culture politique il y aura encore plus de chantage et de marchandage et le système évoluera vers un régime dit d’assemblée, comme en Italie. Les coalitions se font et se défont et les gouvernements tombent. Maurice n’a pas le luxe d’avoir un régime instable.

Le scrutin proportionnel suppose un scrutin de liste. Le parti a une meilleure reconnaissance. Par rapport au pourcentage de voix obtenu par le parti, il lui est attribué un certain nombre d’élus en fonction d’une liste selon l’ordre établi par le parti, en l’occurrence son chef. Ainsi, les chefs de partis auraient une trop grande main mise sur les choix de ceux qui seraient en position d’être élus sur les listes. Guy Carcassonne omet dans son analyse que les principaux partis politiques n’ont pas de fonctionnement démocratique.

Délibérément ou non, le rapport Guy Carcassonne fait l’impasse sur un certain nombre de sujets relatifs à l’organisation de la vie institutionnelle : le rôle du Président, son mode de désignation, le renforcement du pouvoir parlementaire, l’affermissement nécessaire de la démocratie mauricienne etc.

Parvèz DOOKHY